Former en entreprise
Aujourd’hui, nous nous intéressons au formateur en entreprise. Isabelle, animatrice de formation au sein de son entreprise raconte ses débuts sans filet. Puis après l’acquisition de méthodes pédagogiques comment elle a su conforter sa posture d’animatrice de formation auprès de ses collègues et de son entreprise. |
Comment former ses collègues au sein de son entreprise ?
Si vous êtes sollicité pour devenir formateur, ce podcast vous aidera certainement.
Si vous êtes responsable des ressources humaines ou responsable de formation au sein de votre entreprise. Ce podcast vous apportera un éclairage sur le rôle de l'animateur de formation.
Aujourd'hui, j'interroge Isabelle Petit-Félix, animatrice de formations au sein d'un grand groupe français.
Elle raconte ses débuts sans filet, puis après l'acquisition de méthodes pédagogiques, comment elle a su conforter sa posture d'animatrice de formations auprès de ses collègues et de son entreprise.
Nous abordons
Un démarrage sans filet
L’insoutenable légèreté des collègues
Les baskets du formateur
Les émotions
La posture du formateur
Conception et animation de formation
Motivation et individualisation de la formation
Le triangle : soi-même, les autres et le commanditaire
Un démarrage sans filet
Je m'appelle Isabelle Petit-Félix et je travaille pour un grand groupe de média en France, d'audiovisuel public.
Je travaille pour le service internet, mon rôle au quotidien, c'est d'accompagner tous les contributeurs web à publier leur contenu sur les différentes plateformes propriétaires de notre chaîne.
J'ai fait ce qu'on appelle « animateur de formations », donc j'ai moi-même été formée, en interne pour être animatrice de formations, qui consiste à transmettre mon savoir-faire à mes collègues en interne. Donc, essentiellement pour moi, c'était de leur transmettre une partie de mes pratiques sur le numérique. Ce qui peut leur servir à eux dans leur quotidien en tant que contributeur web, au sein des journalistes qui sont dans la rédaction, ou bien des personnels des antennes et programmes ou des services communication.
Les choses se sont passées un peu à l'envers pour moi. On a eu ce besoin assez pressant, au moment de la prise de conscience qu'il fallait vraiment qu'on aille sur le web, qu'on ait une offre globale média. Donc là, assez vite, on m'a dit, du coup va falloir former les gens. Est-ce que toi, en tant que chargé d'édition numérique, tu es capable de le faire? oui, et quand?
Allez hop planning, je n'avais pas eu le temps de moi-même de recevoir une formation d'animatrice de formations de cours. On s'est lancé comme ça avec mon collègue. Donc, j'étais en binôme avec un journaliste qui était aussi spécialiste d'internet, lui plutôt sur le côté vraiment journalistique, éditorial, et moi plutôt sur le côté technique.
Et ensuite seulement j'ai assez vite, ma référente formation en interne, m'a dit: bon ok, on a fait ça comme ça, un peu au pied levé. Maintenant il faut que tu sois toi-même formée pour former les gens, c'est mieux de faire dans ce sens là, donc, c'est là où je suis parti moi-même en formation et que j'ai appris les rudiments de de comment monter une formation, dont je l'ai fait à l'envers. Mais c'est pas grave, ça m'a servi énormément parce que j'avais déjà eu une petite expérience et quelque part, ça m'a aidé en fait dans mon propre apprentissage pour être formatrice.
L’insoutenable légèreté des collègues
Ça pas forcément été simple. Parce que on n'est pas pris au sérieux. En deux mots, on a envie de se comporter comme entre collègues avec légèreté. On n'est pas dans les bons rôles, en fait, tout simplement.
C'est vrai que j'y étais confronté et un peu démunie. Ça s'est bien soldé parce que c'est des personnes que je connais depuis longtemps, et sans filet, on va dire que j'ai réussi à contrer quelques blocages, tout simplement parce pour certains qui n'avaient pas choisi de faire de l'internet. Puisque c'était une offre globale média qu'on souhaitait faire. C'est une directive de l'entreprise. Mais la personne, elle n'a pas forcément complètement bien choisi d'être inscrite à cette formation.
Les baskets du formateur
C'est un classique. La personne arrive et dit: bon, moi, j'ai pas envie d'être là. Enfin, elle fait comprendre qu'elle n'a pas envie d'être là. Et nous, on doit se débrouiller avec ça pour que cette personne n'entrave pas la bonne marche de la formation pour les autres au moins.
Simplement à ces personnes qui sont en blocage, il faut leur rappeler que nous, en tant que formateur, c'est pas nous qui sommes commanditaire de la formation, c'est l'entreprise.
Donc, la formation, c'est là où elle est intéressante. Ça peut paraître un détail, mais ça n'en est pas du tout un. En fait, elle m'a permis d'être beaucoup plus à l'aise dans mes baskets en tant que formatrice.
Les émotions
La psychologie des différents personnages, la peur, la colère sont des choses identifiées et que l'on retrouve très souvent quand les gens se retrouvent en position d'élèves. Il y a une espèce de mini régression qui peut se traduire par des émotions. Je savais qu'elles existaient mais je n'avais pas pointé ça comme étant une caractéristique de l'apprenant.
Donc, je le gérais comme je pouvais. À partir du moment où on m'a dit: non, ça, cette situation-là, elle peut générer ça. Et du coup, On peut vous donner le conseil de réagir comme ci, comme ça.
Forcément j'ai eu des clés, parce que naturellement, même si j'aime beaucoup apprendre aux gens, si j'étais face à un blocage, je suis comme tout le monde. Je n'avais pas forcément les outils pour m'en sortir. Comme n'importe quel humain face à une émotion, elle s'imprègne aussi sur nous.
Si on n'avait pas ces outils-là, on est encore plus emprunt à - soit les envoyer promener, parce qu'on a un vécu avec eux qui déteint et qui ne devrait pas du tout déteindre pendant la information ou soit au contraire être beaucoup trop en empathie avec eux et maternante, parce qu'on les a identifiés comme personne fragile, en général parce qu'on les connaît. Et que, du coup, c'est pas en les maternant qu'on va les faire apprendre.
Donc, je trouve que la formation est d'autant plus intéressante, quand on est face à des populations qu'on connaît parce que les dés sont pipés, en fin de compte.
Conception et animation de formation
Donc la formation. Oui, elle m'a donné des outils.
La deuxième fois, moi-même étant formé, j'ai re-préparé complètement mon cours en amont, parce qu'en formation on apprend à faire un scénario pédagogique, chose que j'avais fait intuitivement, évidemment, avec mon collègue. On s'était réuni une après-midi, enfin, quelques heures ensemble en se disant: comment va-t-on structurer notre cours entre guillemets.
Donc là on a plus vraiment parlé de cours. On est parti plutôt sur des méthodes. On était plus structurées dans notre préparation.
On a fait quelque chose de plus, interactif tout simplement, puisque il y a plein de méthodes qu'on n'aurait peut-être même pas osé faire. Parce qu'on a quand même un peu l'image du professeur qu'on a eu quand on était sur les bancs de la fac ou à l'école. C'est complètement à sens unique or on apprend plus comme ça. Encore moins dans le côté professoral, en interne, avec des collègues, c'est ridicule de faire comme ça !
Motivation et individualisation de la formation
Il y a aussi quelque chose que je n'avais pas soupçonné, c'est que les personnes aient bien compris quel est l'objectif de la formation.
Pour moi, c'était évident. On a un intitulé, on sait qu'on va être en formation. Il y a écrit trois, quatre lignes. Pour moi ça suffisait. Non, en fait, il faut beaucoup plus préparer, et même si on a un intitulé avec un contenu pédagogique un peu digne de ce nom, un peu plus précis, je pense que chaque apprenant doit se fixer son propre objectif au sein du cadre qui lui est proposé.
Justement, en plus, ce qui a été compliqué dans ces formations là, c'est qu'il y a des profils qui pouvaient pratiquer tout de suite derrière et d'autres qui, pour des raisons de planification, savaient qu'ils n'allaient pas pouvoir s'en servir. Donc leurs objectifs n'étaient pas les mêmes.
J'ai trouvé que le fait d'avoir une forme d'autonomie dans son propre objectif - en tant qu'apprenant - qui s'inscrit dans un grand cadre. Je trouve que c'est plus gratifiant pour l'apprenant, surtout quand on est déjà en poste.
Nous-mêmes, cela nous a permis de voir assez vite les différents groupes qu'il y avaient et d'adapter notre contenu pédagogique. Je trouve que plus on est transparent sur les objectifs, plus on est précis et, contrairement à ce qu'on pense, - quand on n'en a pas beaucoup, je précise - plus c'est facile pour formateur.
Le triangle : soi-même, les autres et le commanditaire
Finalement, une fois qu'on sait ce qu'on doit transmettre, à peu près comme on va le transmettre - donc la méthode d'apprentissage - le côté complètement aléatoire, c'est comment va réagir l'apprenant. C'est ça qui est difficile à gérer.
Ce qu'on sait faire tous les jours, en général, on le transmet bien, surtout si on aime le faire.
Moi, je trouve que le plus important, c'est ce qu'on a dit tout à l'heure, c'est de bien comprendre le commanditaire, la commande et bien identifier si on est en accord avec cette commande.
Si on est en désaccord avec le commanditaire et dans quel contexte il veut qu'on forme ses collègues, si nous-mêmes, on est aussi mi-figue, mi-raisin, que l'on n'a pas réfléchi à la commande et qu'on est en accord avec sa propre direction, ça veut pas dire qu'on dit amen à tout, c'est pas ça.
Il faut bien juger, si on est capable de répondre au commanditaire, ce qui n'est pas forcément toujours quelque chose qu'on a bien évalué.
Donc, ça fait trois choses: soi-même, les autres et et le commanditaire. C'est le triangle.
J'espère que cet entretien vous a apporté des réponses et vous permet de vous projeter un peu plus dans ce rôle de formateur en entreprise. Et des nécessaires clarifications d'objectifs avec l'apprenant, tout comme avec votre employeur.